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2 février 2009

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Une des plus riches communes de Suisse dit stop à l’invasion fiscale

IMPÔTS | Freienbach, dans le canton de Schwytz, affiche un des plus bas taux d’imposition du pays. Beaucoup tentent de s’y installer, quitte à se créer une adresse fictive. «Gaffe!» dit la commune, qui traquera désormais tous ceux qui ne viennent que pour alléger leurs impôts.



Freienbach

© DOMINIK FRICKER | Les autorités de Freienbach ont lancé la chasse aux contribuables qui se domicilient dans la commune sans y habiter, aux dépens de ceux qui désirent y vivre quotidiennement.

Nadine Haltiner, Freienbach | 02.02.2009 | 00:02

«Appartement de 4,5 pièces à deux pas du centre, ensoleillé, balcon et vue sur les montages. Prix: 2550 francs.» Cette petite annonce, dégotée sur internet, n’a, a priori, rien d’exceptionnel. Pourtant, elle vaut de l’or. Car, trouver un logement à Freienbach, la plus grande commune de Schwytz, relève du parcours du combattant. Non pas que le village soit spécialement joli: une grosse route le traverse de bout en bout, des graffitis ornent les murs de la gare et des locatifs en béton côtoient les villas mitoyennes construites au bord du lac de Zurich. Si la commune de 15 000 âmes souffre d’une pénurie de logements, c’est moins grâce à son charme que parce qu’elle est la moins chère de Suisse.

Son imbattable taux d’imposition a déjà attiré bon nombre de personnalités fortunées, dont le financier Martin Ebner, les joueuses de tennis Patty Schnyder et Martina Hingis, ou encore le footballeur Ricardo Cabanas. Un attrait fiscal pour lequel même les petites annonces immobilières font de la pub. Celle trouvée sur internet précise, par exemple, qu’une personne gagnant 120 000 francs par an paie 24 000 francs d’impôts à Zurich contre seulement 14 000 francs à Freienbach. De quoi donner envie de déménager…

Pourtant, aujourd’hui la commune dit stop! Et traque tous ceux qui essaient de profiter de sa fiscalité, sans pour autant vouloir réellement y habiter. «Chaque mois, trois à quatre personnes tentent de s’inscrire au contrôle des habitants sous une adresse fictive, explique Lukas Meier, chef du Service des impôts. Certains se créent une boîte aux lettres dans une collocation. D’autres sont plus imaginatifs et donnent l’adresse d’une étable, d’une grange ou d’une prairie. Un jour, une dame qui possédait une villa de huit pièces dans le canton de Vaud a loué une toute petite chambre à Freienbach. Elle racontait partout qu’elle ne vivait dans sa maison que pendant ses vacances. En fait, elle travaillait tous les jours à Genève!»

Pour sévir contre cette invasion fiscale, Freienbach et ses riches voisines, Wollerau et Feusisberg, ont créé un site internet www.scheindomizile.ch. Leur objectif est de dissuader tous ceux qui ont pour seul but de faire des économies. «A chaque nouvelle inscription, nous vérifions systématiquement si la personne vit ou travaille vraiment dans la commune, précise le chef du Service des impôts de Freienbach. Au moindre doute, je convoque le nouveau venu pour un entretien. Et s’il ne réside pas dans le village, je refuse sa déclaration d’impôt et demande à son ancienne commune de le taxer.»

«Faiseurs de Schwytz»
Après dix-huit ans de service, Lukas Meier sait comment dénicher ceux qu’il appelle «les malhonnêtes». «Je vais interroger leurs voisins et s’il le faut je vais voir chez eux s’ils y vivent bel et bien.» Son job, c’est un peu celui d’Emil dans le film Les faiseurs de Suisse. Même si lui joue plutôt les «Faiseurs de Schwytz». «Je n’ai guère le choix, dit-il. D’une part ces gens représentent une perte financière pour les autres cantons. D’autre part, ils sont un danger pour notre commune qui, à force d’être composées de citoyens inexistants, risque de mourir.»

Une vision d’horreur dont les premières traces s’observent déjà dans les rues de Freienbach. Les passants se font rares, la plupart des magasins sont fermés et les bistrots manquent de clientèle. De quoi alimenter le débat autour du Stammtisch du bistrot de la gare. «Nous ne sommes plus qu’une cité-dortoir», note une dame de 50 ans née dans le village. «Les gens dorment ici et travaillent à Zurich.» «En plus, les loyers ont pris l’ascenseur à cause des millionnaires qui se sont installés, ajoute son voisin. Ma fille et son mari n’ont même pas pu élever leurs enfants ici, faute d’avoir trouvé un appartement abordable!»

Tous espèrent que le tour de vis de la commune rapporte un peu de vie à Freienbach. «De toute façon, on a déjà bien assez de riches, conclut le plus âgé de la tablée. Et nous sommes bien la preuve que l’argent ne fait pas le bonheur.»


A Zurich, les forfaits fiscaux font débat

Autre canton, autre débat. A Zurich, tous les regards se tournent vers la votation du 8 février. Outre la libre circulation, le canton devra en effet s’exprimer sur les forfaits fiscaux pour les étrangers, qu’une initiative de la gauche propose d’abolir.

Les forfaits fiscaux? Tout le monde en a déjà entendu parler, tant le sujet est brûlant. Michael Schumacher, Johnny Hallyday ou encore Tina Turner en bénéficient. Il s’agit d’une forme d’imposition spéciale destinée aux étrangers qui vivent en Suisse, mais n’y travaillent pas. Au lieu de les taxer sur leurs revenus ou leur fortune, l’Etat calcule un forfait selon leurs dépenses. La règle veut qu’on impose généralement au minimum la valeur du loyer annuel multiplié par cinq. Une aubaine pour les riches du monde entier.

Leur nombre n’a cessé de croître en Suisse ces dernières années. Il y a dix ans, ils étaient 3106. Et selon les derniers chiffres publiés, on en recensait 4146 en 2006. Champion en la matière, le canton de Vaud en compte à lui seul environ 1100, suivent le Valais (860) et Genève (600). A Zurich, on ne compte «que» 137 personnes ainsi taxées. Et pourtant. C’est là que de plus en plus de voix s’élèvent pour abolir, ou modifier, cette forme de taxation.

Dans la commune de Küsnacht, sur la Goldenküste, la cheffe des Finances a tiré la sonnette d’alarme dimanche dernier dans la NZZ am Sonntag. «Nous comptons 18 forfaits fiscaux, si leur nombre augmente encore, on risque d’avoir un problème, explique Ursula Gross Leemann. Si des personnes normalement taxées habitaient dans ces logements, la commune en tirerait plus de bénéfices.»

Une vision partagée par d’autres communes zurichoises qui constatent que les riches étrangers «piquent» des biens immobiliers aux riches Suisses qui pourraient payer, eux, bien plus d’impôts. En plus, beaucoup de ces étrangers ne vivent même pas réellement dans leur commune.

Pour autant, la radicale Ursula Gross Leemann ne veut pas abolir les forfaits fiscaux. Elle propose d’augmenter leur taux d’imposition. Jusqu’à présent, sa proposition n’a reçu que peu d’écho, particulièrement dans les cantons romands qui tiennent mordicus à leur rentrée d’argent. Mais si les Zurichois donnent un signal fort dimanche prochain, il est possible que les autres cantons se mettent d’accord pour réviser leurs tarifs vers le haut.

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